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Que vous soyez caution d’un prêt contracté dans le cadre d’une activité professionnelle, qu’il s’agisse d’un prêt immobilier ou d’un prêt à la consommation, de nombreux arguments peuvent être mobilisés pour contester la validité ou la mise en œuvre d’un engagement de caution.

D’une part la loi édicte un formalisme strict qui doit être respecté sous peine de nullité (1) ; d’autre part des arguments de fond peuvent utilement être avancés afin de remettre en cause l’engagement de la caution (2).

1.Sur les vices de forme

1.  Sur le formalisme de l’acte de cautionnement

Le principe :
Dans une perspective de protection de la caution, le législateur a prévu un formalisme strict à peine de nullité. Ainsi l’article L.331-1 du code de la consommation (anciennement article L.341-2) prévoit une mention manuscrite obligatoire qui doit être rigoureusement recopiée dans l’acte de caution. Cette disposition concerne « toute personne physique qui s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution » et n’est donc pas limitée aux consommateurs.

La sanction :
La sanction prévue en cas de non-respect de ces formalités est la nullité de l’engagement de caution. Si la jurisprudence a pu se montrer particulièrement protectrice de la caution en considérant qu’une légère modification de la mention manuscrite (Cass. Civ. 1ère 16 Mai 2012, N°11-14.411) entraînait la nullité de l’engagement de caution, la tendance est aujourd’hui à la recherche d’un équilibre.
Le non-respect des formalités doit avoir vicié le consentement de la caution, ce qui n’est pas le cas en présence d’erreurs de ponctuation (Cass. com., 5 avril 2011, no 10-16.426, Cass. 1re civ., 11 septembre 2013, no 12-19.094, Cass. 1re civ., 22 janvier 2014, no 12-29.177).
Le libéralisme de la jurisprudence s’est encore manifesté à propos de l’omission de certains termes prévus dans la mention manuscrite. En l’absence des mots « et mes biens », le cautionnement n’encourt pas la nullité mais les biens de la caution sont exclus du droit de poursuite du créancier (Cass. com., 1er octobre 2013, no 12-20.278). Seuls les revenues peuvent être saisis par le créancier.

En pratique, comment faire ?
Relisez bien votre engagement de caution et vérifier que les mentions obligatoires sont présentes. Dans le cas contraire, il est possible d’invoquer la nullité de l’acte de caution.

2. Sur l’information annuelle de la caution :

Le principe :
L’article L.313-22 du Code Monétaire et Financier met à la charge de l’emprunteur une obligation d’information annuelle concernant le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente. Chaque année avant le 31 Mars, le prêteur doit envoyer un courrier d’information à la caution.

La sanction :
Le non-respect de cette obligation emporte déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu’à la date de communication de la nouvelle information (Cass. com., 15 oct. 2013, n° 12-25.523).

En pratique, comment faire ?
Si vous n’avez pas reçu une information annuelle, il est possible de contester les sommes payées au titre des intérêts. Il suffit pour la caution de soulever l’inexécution de son obligation par l’établissement bancaire, puisque la preuve de la délivrance de cette information pèse sur le débiteur de l’obligation (la banque).
Attention, cette procédure ne remet pas en cause l’obligation de rembourser le principal.

2. Sur les arguments de fond permettant de contester la validité de l’acte de cautionnement

1. La disproportion entre l’engagement de caution et le revenu et le patrimoine de la caution

Le principe :
Il est possible de faire échec à la mise en œuvre d’un engagement de caution en soulevant son caractère disproportionné au regard des biens et revenus du débiteur.
L.332-1 du Code de la consommation prévoit en effet qu’un acte de cautionnement disproportionné aux biens et revenus du débiteur ne peut être invoqué par un créancier professionnel. Ce texte s’applique à toute personne physique (donc également un gérant de société) « dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

La Sanction :
Techniquement, l’engagement n’est pas annulé, mais le prêteur professionnel ne peut pas s’en prévaloir. Dans les faits, la caution sera libérée de son engagement. Il convient de précise ici que la disproportion de l’engagement de caution s’apprécie sans tenir compte des revenus escomptés de l’opération garantie (Cass. 1re civ., 3 juin 2015, n° 14-13.126 et Cass. Com. 26 janvier 2016 14-21.913).

En pratique, comment faire ?
La disproportion s’apprécie au jour de la conclusion de l’acte. Il convient de fournir les relevés d’imposition de l’année précédant la signature de l’acte de caution ainsi que toute autre document permettant de soutenir que l’engagement était disproportionné aux biens et revenus du débiteur.
Si le créancier estime que la situation financière du débiteur s’est améliorée, la charge de la preuve pèse sur le créancier.

2. La violation de son obligation d’information et de conseil par le banquier

Le principe :
L’emprunteur professionnel est tenu d’une obligation d’information envers l’emprunteur. L’intensité de cette obligation varie en fonction de l’expérience de l’emprunteur ou de la caution. Une caution néophyte sera davantage protégée par les tribunaux qu’un individu expérimenté et averti (Cass. Com. 11 avril 2012 10-25.904).

Le nouvel article 1112-1 du Code civil vient utilement préciser les contours de l’obligation d’information précontractuelle : « Celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant. » Cet article, qui a vocation à s’appliquer à toutes les relations contractuelles, fournit un fondement textuel jusqu’alors inexistant pour l’obligation d’information et de conseil du banquier.

La Sanction :
Le manquement de la banque à son obligation d’information et de conseil engage sa responsabilité. L’acte de cautionnement reste techniquement valable, mais la banque pourra être condamnée à indemniser la caution, le montant ainsi alloué se compensant avec les sommes dues au titre de l’engagement de caution (Cass. Com. 11 avril 2012 10-25.904). Le montant alloué permet généralement de diminuer la créance de la banque mais non pas de l’annuler.

En pratique, comment faire ?
La charge de la preuve pesant sur le débiteur de l’obligation, il appartient à la banque de prouver qu’elle a bien rempli son obligation d’information et de conseil (Cass. Com. 24 avril 2007, N°05-22.118).
Il convient d’expliquer pourquoi vous estimez que la banque n’a pas rempli son obligation d’information et de conseil. Dans cette perspective, n’hésitez pas à apporter des éléments très concrets à votre argumentation : quelles sont les informations qui auraient été utiles mais que la banque ne vous a pas transmises ? La décision a-t-elle été prise hâtivement ? Aviez-vous une quelconque expérience dans le secteur d’activité concerné s’il s’agit d’un prêt professionnel ?
Les magistrats ont une appréciation très concrète des dossiers et ils attachent une grande importance à l’expérience de la caution mais aussi à la situation particulière de l’organisme bancaire. Ainsi une banque a été condamnée récemment car les juges ont estimé qu’elle se présentait comme un intervenant spécialisé dans le monde de la franchise. Elle a donc dû verser des dommages et intérêts à un ancien franchisé qui estimait qu’elle ne l’avait pas correctement informé sur l’absence de rentabilité d’un réseau (Cour d’Appel de Versailles 13 septembre 2016, N° 15/03533).

Monique Ben Soussen
Avocat au Barreau de Paris